Search This Blog

Sunday, June 6, 2010

Infertilité masculine: Face cachée de mes consultations au CHU de Donka, Conakry

As-tu rencontré un homme qui accepte sa stérilité ? S’il est stérile, il rejette le plus souvent sur le compte de sa femme. Combien de femmes ont été reprochées pour cause de stérilité et une fois remariées, elles ont des enfants. L’homme se dit toujours viril et non stérile. Ils sont rares ceux qui acceptent et se font traiter ; pour eux l’infécondité est purement féminine, comme ceux qui accusent leurs femmes d’avoir des filles. Beaucoup d’hommes vivent leur stérilité comme une tare, la cachent, ne la dévoilent pas et vont même refuser d’aller jusqu’aux soins. Le fait même d’évoquer la possibilité de ce diagnostic est source d’inquiétude et d’angoisse. Mr. K. me disait « Je peux vivre sans enfants, mais je ne pourrai pas vivre avec la certitude que je suis stérile ». D’autres ont le courage d’aller consulter mais tiennent leur partenaire dans l’ignorance de leur démarche. D’autres en fin consultent, jouent le tout, mais font en définitive porter la responsabilité sur leur partenaire ou pire encore sur des forces obscures qui leur veulent du mal.

Dans mon travail sur l’infertilité du couple, j’avais une philosophie claire : »L’être humain est composé de trois personnalités : anatomique or tissulaire, psychologique, et sociale. Cette première partie de mon travail sera basée sur les conséquences psycho-sociales de l’infertilité du couple. Pendant mes recherches, j’ai été influencé par ma naissance, le lieu et la société, le monde Manding où on aime dire : »une maison sans enfant, est une ruche sans abeille ». Un jour, alors que je me baignais dans le majestueux et historique fleuve Niger arrosant le flanc ouest de mon village, j’entendais les femmes dire, come Sofiane Zribi sous sa plume du 23 Février 2010 écrivait : « Au lit, nous sommes comme deux vieillards, nous regardons la télévision, commentons l’actualité, et nous nous endormons sagement ». A la base du désir sexuel, se place l’instinct biologique de reproduction. Dans la mesure où la conscience de l’impossibilité de se reproduire devient évidente pour l’un ou l’autre des partenaires, on peut comprendre le tarissement libidinal qui suit.

Nous vivons encore dans des milieux où on recourt à des proverbes, des contes, des chansons et autres propos de la coutume pour justifier la discrimination de la femme. Un autre propos courant qui se dit : « La femme est sortie de la côte de l’homme » ; donc, elle est inférieure. (Je demanderai à toutes les femmes mariées de regarder dans le flanc de leurs maris pour trouver le trou d’où elles sont sorties parce que depuis Adam et Êve, je ne suis pas au courant d’aucun autre fait de ce genre). Même dans certaines familles d’intellectuels, l’éducation est différente entre un petit garçon prédestiné à être chef et une petite fille à obéir. En grandissant, certains garçons se donnent même le pouvoir sur celles qui leur ont donné la vie : leur mère ! En plus, les propos souvent injurieux, indiscrets ou sexistes, que se lancent les parents ou d’autres adultes devant les oreilles attentives des enfants. Par exemple, dans nos familles, quand un enfant s’est mal conduit, le papa dit souvent »c’est comme ta mère » ou « ce défaut vient de la mère, pas de moi ». D’habitude, dans la famille, ce qui va, revient au père et ce qui ne va pas revient à la mère ». N’est-il pas être dupe que de croire qu’un tel homme accepte facilement sa culpabilité dans l’infertilité du couple ?

Dans ma propre famille, je voyais ma mère se mettre à genoux chaque matin pour dire bonjour à mon père, pour lui donner de l’eau pour se désaltérer, se mettre à genoux in the lavabo, à côté de l’eau jusqu’à l’arrivée du papa, et ne disait jamais non à mon père en présence d’un étranger à la famille. Elle marchait toujours derrière mon père. Pourtant, elle avait 13 enfants dont je fus le neuvième né. Même les produits de son jardin appartenaient à mon père. It était interdit aux femmes de mon village de passer au milieu deux hommes, d’élever leur voix quand les hommes leur parlent. Un véritable patriarcal système était en place dans ce village des « Bérété » où on ne donnait presque jamais ouvertement raison à la femme au dépend de son mari. It serait conséquemment moins intelligent de croire que mon lignage et clan vont reconnaître avec sincérité leur infertilité.

La femme est le pilier de la famille et partant la société. Tous les rôles qu’on lui attribue (femme comme agent de transmission de l’héritage culturel ; femme, un agent de la transmission des savoirs ésotériques or l’élément qui détient un pouvoir mystique ; femme, un agent de conservation du clan or pérennisation du clan ou la tribu ; femme, agent de transmission perceptible dans l’éducation de la fille ; femme, agent de procréation, celui de mère, de femme de foyer avec tous les attributs qui vont avec ; femme, une valeur marchande, comparée à une bête de somme sous la plume de Senghor ; femme, un rôle social ; femme profanatrice des principes traditionnels). La tradition donne à l’homme la supériorité sur la femme et par conséquent elle doit s’occuper de tous les vils devoirs de la maison dont ceux de répondre à tous les caprices, désirs et volonté de l’homme. Celui-ci a comme un pouvoir illimité sur les femmes et les enfants au point de disposer de la destinée des unes et des autres. Comment parvenir à convaincre de tels hommes à reconnaître tacitement leur culpabilité dans la stérilité du couple ?

Dans la société traditionnelle Manding, le mariage était moins une union entre deux personnes qui s’aiment et mer, un moyen de renforcer une alliance entre deux familles. Chaque famille avait, pour ainsi dire, des familles alliées, où ses hommes pourraient prendre des épouses : » Foudognô ». Un jeune homme issu d’une famille ne choisit pas par hasard et en fonction de ses sentiments, une femme dans le village. Quand le jeune homme a été assez vieux pour se marier, il est retourné à son père pour demander la main d’une fille dans la famille « Foudougnô ». Il peut arriver que l’époux rejette celle qui a été proposée en faveur d’une autre fille, mais toujours dans le cadre étroit de « Foudougnô ». Ainsi, l’augmentation des mariages entre les jeunes de la même « Foudougnô », permet de renforcer les alliances et la cohésion de ces familles. Dans une telle société, être homme signifie : 1.pouvoir avoir des relations sexuelles (manger une femme…) ; 2. Pouvoir mettre une femme enceinte (féconder) ; 3. Pouvoir entretenir une femme, un groupe social ; 3. Avoir de la force, du courage ; 4. Avoir de l’autorité sur les femmes ; 5. Se faire respecter des autres hommes ; 6. Faire la preuve de sa puissance. Ces hommes sont-ils dupes de se soumettre aisément à des testes d’infertilité si les caractéristiques suivantes ne sont remplies comme identité d’enfant, honte. La fécondité est la base identitaire du devenir et de la complétude. L’individu sans enfant est une aberration qui dérange tous les schémas.

Il conviendrait de comprendre ces couples victimes et l’enjeu social de l’infécondité comme par exemples :

1. Fonction dans la famille : augmenter le capital humain (fait ton enfant, donne mon nom)

2. Fonction du mariage : intégration à la belle famille (alliance, continuité de la lignée, l’enfant prime sur le conjoint)

3. Répudiation, divorce (poids sur la femme).

Les hommes et les femmes incapables d’avoir des enfants subissent souvent de graves conséquences comme la perte de leur statut familial et communautaire.

Pour les femmes en particulier, l’infertilité peut avoir des effets cruels. Elles sont ostracisées par leur milieu, ridiculisées par leurs amies et leur voisins ou encore battues et abandonnées par leur mari. Il arrive qu’on leur interdise de toucher aux bébés par crainte qu’elles soient des sorcières, ou qu’on les empêche d’hériter de biens familiaux, qu’on les prive de soutien financier pour leur vieux jours et qu’on leur refuse un enterrement décent. Dans la tribu Yoruba (Nigéria), les femmes infertiles sont appelées « agon », un terme qui exprime le mépris. Même si la stérilité du couple est d’origine masculine, un divorce peut menacer l’épouse. Au Bangladesh, on conseille fréquemment un remariage comme remède à une infertilité dans la famille. « Celui qui reste avec une femme infertile se fait traiter de mauvais sujet », telle est l’opinion générale.

Bien qu’à un degré moindre, les hommes infertiles doivent aussi affronter ridicule et stigmatisation. Dans certaines cultures, les enfants reflètent la richesse et la prospérité de leur père, alors que les hommes sans progéniture sont moins respectés. C’est ce qu’a montré une étude menée au Zimbabwe. Certains sujets ont déclaré s’être vu refuser un travail ou une fonction importante dans leur communauté pour la seule raison qu’ils n’avaient pas d’enfant. D’autres hommes ont confié que leur incapacité à procréer signifiait la honte de l’ensemble de leur famille. D’autres encore, déterminés à prouver leur fertilité, ont dit avoir des relations sexuelles avec multiples partenaires dans l’espoir d’en mettre une enceinte.

Les hommes se sachant stériles ont parfois une image d’eux-mêmes moins masculine. Chez les hommes acceptant la possibilité de leur infertilité, on note parfois une réticence à bénéficier d’un conseil. »Ces hommes ne veulent pas discuter de leur vie privée, surtout s’il s’agit d’un problème de stérilité », précise Betty Chishava, qui dirige au Zimbabwe le hipo Chedu Trust ? une organisation non gouvernementale offrant éducation et conseil sur l’infertilité et ses effets. Dans la société zimbabwéenne comme dans mon village de naissance, un homme n’est reconnu comme tel que s’il a des enfants. Un homme sans héritier s’inquiétera du futur de ses biens et de son nom après sa mort ».

Pourtant les hommes doivent comprendre que les anomalies du spermogramme sont de plus en plus fréquentes. L’infertilité masculine est en nette augmentation dans le monde entier, notamment dans les développés malgré des conditions de vie relativement peu astreignantes, allant de l’hypofertilité à la stérilité totale et irréversible. Outre les causes médicales (maladies génétiques, infectieuses, inflammatoires, radiations, traumatisme), l’influence d’une exposition professionnelle ou non, d’une toxicité alimentaire, de l’hygiène de vie joue un rôle important dans la quantité du sperme et des spermatozoïdes.

La pollution : 1. La toxicité des phtalates, retrouvées entre autres, dans nombreux emballages plastiques, dans le PVC, exerce une négative influence sur les cellules germinales qui constituent le précurseur des spermatozoïdes ; 2. Les pesticides.

Les hormones notamment hormones de croissance qui, ingérées durant la grossesse, sont responsables de syndrome de virilisation chez le fœtus féminin et altérations des gonades chez le fœtus masculin, entraînant une hypofertilité à l’âge adulte.

La chaleur : La spermatogenèse est un phénomène extrêmement sensible à la température. Les spermatozoïdes doivent être à une température entre 33_ 34°C. En fonction de la température les bourses se contractent ou se détendent de manière à conserver cette température constante. Une augmentation de la température des testicules entraînent un ralentissement voire un arrêt de la spermatogénèse. A long terme on observe des destructions au niveau de la structure des testicules responsables de stérilité.

Autres habitudes de vie : 1.Alimentation comme aliments contaminés de produits chimiques (emballages plastiques, pvc), par des pesticides (fruit et légumes) ; 2. Tabagisme ‘fumer tue’. Le tabagisme, par le biais du monoxyde de carbone, du stress oxydatif qu’il provoque, va entrainer une destruction des vaisseaux sanguins de l’appareil génital masculin. Au niveau du pénis ceci est responsable d’une altération de la qualité et de la durée de l’érection (pouvant aller jusqu’à l’impuissance). Au niveau des testicules, les altérations vasculaires entraînent une destruction plus moins irréversible de la spermatogenèse ; 3. Alcool : Les alcools forts et la consommation excessive d’alcool contribue à un environnement de stress métabolique au niveau de l’organisme, responsable de production de radicaux libres ; 4. Vêtements : Le port de pantalons serrés, moulants, en tissus synthétiques entravent la circulation du sang au niveau du périnée et augmente la température au niveau des testicules, provoquant des anomalies de la spermatogenèse ; 5. Traumatismes : vélo, équitation, ne sont pas les meilleurs amis sportifs de nos hommes. Microtraumatismes, augmentation de la chaleur locale et gêne à la circulation du sang menacent la qualité du sperme ; 6. Stress agit à tous les niveaux de la spermatogenèse, depuis la stimulation cérébrale par inhibition ou dérèglement de libération hormones aux testicules par altérations vasculaires, métaboliques, hormonales et tissulaires.

Pendant ma recherche sur l’infertilité du couple au centre hospitalier et Universitaire de Donka, les plus grandes difficultés et handicapes venaient des hommes. Des fois, je payais leur transport pour se rendre aux laboratoires de l’Institut Pasteur de Kindia, à l’hôpital de Friguia, à Kamsar, ou à la clinique russe, but en vain. Les consultations étaient gratuites pou eux et leurs femmes, ou je payais même de mon propre chef avec des résultats maigres dans le respect des rendez-vous, mais non sur le plan thérapie qui fera l’objet de la prochaine publication.

En plus de la médecine moderne, l’homme doit chercher des stratégies pour augmenter la concentration des spermatozoïdes. Il existe des solutions parallèles naturelles qui peuvent être utiles en ce sens, surtout dans notre pays à majorité vivant dans les zones rurales.

Démon : Chez l’homme, on sait que la conception nécessite au moins 20 millions de spermatozoïdes par millilitre de sperme. Parfois, le démon agit sur le testicule(en exerçant une pression dessus, par exemple) pour diminuer sa production et sa libération de spermatozoïdes de façon à entraver la conception. Quand les spermatozoïdes arrivent à la vésicule terminale, ils y baignent dans un liquide nutritionnel indispensable à leur survie ; le démon intervient quelquefois en inhibant le fonctionnement des glandes qui secrètent ce liquide laissant les spermatozoïdes se détruire et rendant par conséquent, la conception impossible.

En accord avec Serigne Samba Ndiaye, quelque plantes peuvent aider à concevoir. La stérilité est une cause majeure de désarroi. Elle peut nécessiter le choix d’une solution technologique de pointe. Aussi, dans beaucoup de cas d’infertilité, la médecine traditionnelle a son rôle à jouer avec succès.

Je me suis souvent trouvé devant des scènes de traitement de la stérilité du au démon. °Le malade doit réciter ou écouter la sourate°ou »les voies de l’ascension ».

Est que ces faits pré-mentionnés m’ont ou non aidé dans mes recherches ?

En conclusion, l’infertilité constitue l’une des crises les profondes du couple. Elle menace tous les aspects de la vie à deux : Elle n’affecte pas uniquement les relations entre les deux partenaires, mais touche également chacun individuellement, en affectant le sens du moi, les rêves d’avenir, les relations avec les parents, les amis et collègues. Peu de crises mettent en question autant d’aspects psychologiques et sont aussi accablantes. Pourtant l’attention se concentre généralement sur les aspects physiologiques de l’infertilité. Les conséquences psychologiques sont souvent ignorées et non traitées. Il en résulte pour la plupart des patients une souffrance intense et solitaire, qui augmente d’autant le stress et peut avoir une influence néfaste sur les le résultat du traitement. Le traitement de l’infertilité, indépendamment du type de thérapie, connaît actuellement un taux élevé de réussite. Les couples infertiles devraient toutefois garder à l’esprit qu’en fonction de leur problème spécifique, une grossesse ne jamais être garantie. Bien connaître et comprendre les aspects médicaux, ainsi que les problèmes personnels liés à la spirale émotionnelle de l’infertilité, aidera les couples à vivre leur infertilité et à trouver une solution si une grossesse ne peut être obtenue. Pour certains, cette solution consistera à poursuivre un traitement après plusieurs tentatives, d’autres trouveront une réponse dans l’adoption ou même dans le choix d’une vie sans enfant. Quelle que soit la manière dont les couples cherchent à résoudre leur infertilité, ils doivent avoir pleine conscience du fait que le chemin à parcourir entre la prise de conscience du problème et sa résolution passe par différentes étapes, qui se caractérisent chacune par des problèmes et des soucis spécifiques. En reconnaissant cela et ayant toutes les informations et la patience nécessaires pour traverser ces différentes phases, les couples seront en mesure d’adopter la solution la plus pertinente

Dr. Mory Souanou Bérété

Docteur en Médecine, MD

Gynécologue-accoucheur

Ph.D, Médicales sciences

Maitrise en Santé Publique, MPH

Licencié formation infirmière, Virginia

Membre de la Fédération Internationale des gynécologues accoucheurs d’expression Française

Membre correspondant du collège français des gynécologues accoucheurs

Ex- chef de chaire de gyn-obst. Université Conakry

Premier Président de l’association des Gynécologues- accoucheurs de Guinée

No comments: